Par IGNACIO RAMONET
Directeur du Monde diplomatique de 1990 à 2008.
LE typhon sur les Bourses d’Asie menace le reste du monde. La mondialisation du capital financier est en train de mettre les peuples en état d’insécurité généralisée. Elle contourne et rabaisse les nations et leurs Etats en tant que lieux pertinents de l’exercice de la démocratie et garants du bien commun.
La mondialisation financière a d’ailleurs créé son propre Etat. Un Etat supranational, disposant de ses appareils, de ses réseaux d’influence et de ses moyens d’action propres. Il s’agit de la constellation Fonds monétaire international (FMI), Banque mondiale, Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) et Organisation mondiale du commerce (OMC). Ces quatre institutions parlent d’une seule voix - répercutée par la quasi- totalité des grands médias - pour exalter les « vertus du marché ».
Cet Etat mondial est un pouvoir sans société, ce rôle étant tenu par les marchés financiers et les entreprises géantes dont il est le mandataire, avec, comme conséquence, que les sociétés réellement existantes, elles, sont des sociétés sans pouvoir (1). Et cela ne cesse de s’aggraver. (Lire, pages 12 à 15, notre dossier sur la crise financière actuelle.)
Succédant au GATT, l’OMC est ainsi devenue, depuis 1995, une institution dotée de pouvoirs supranationaux et placée hors de tout contrôle de la démocratie parlementaire. Une fois saisie, elle peut déclarer les législations nationales, en matière de droit du travail, d’environnement ou de santé publique, « contraires à la liberté du commerce » et en demander l’abrogation (2). Par ailleurs, depuis mai 1995, au sein de l’OCDE, et à l’écart des opinions publiques, se négocie le très important Accord multilatéral sur les investissements (AMI), qui devrait être signé en 1998, et qui vise à donner les pleins pouvoirs aux investisseurs face aux gouvernements.
Le désarmement du pouvoir financier doit devenir un chantier civique majeur si l’on veut éviter que le monde du siècle à venir ne se transforme en une jungle où les prédateurs feront la loi.
Quotidiennement, quelque 1 500 milliards de dollars font de multiples allers et retours, spéculant sur des variations du cours des devises. Cette instabilité des changes est l’une des causes de la hausse des intérêts réels, qui freine la consommation des ménages et les investissements des entreprises. Elle creuse les déficits publics et, par ailleurs, incite les fonds de pension, qui manient des centaines de milliards de dollars, à réclamer aux entreprises des dividendes de plus en plus élevés. Les premières victimes de cette « traque » du profit sont les salariés, dont les licenciements massifs font bondir la cotation boursière de leurs ex- employeurs. Les sociétés peuvent-elles longtemps tolérer l’intolérable ? Il y a urgence à jeter des grains de sable dans ces mouvements de capitaux dévastateurs. De trois façons : suppression des « paradis fiscaux » ; augmentation de la fiscalité des revenus du capital ; taxation des transactions financières.
LES paradis fiscaux sont autant de zones où règne le secret bancaire, qui ne sert qu’à camoufler des malversations et d’autres activités mafieuses. Des milliards de dollars sont ainsi soustraits à toute fiscalité, au bénéfice des puissants et des établissements financiers. Car toutes les grandes banques de la planète ont des succursales dans les paradis fiscaux et en tirent grand profit. Pourquoi ne pas décréter un boycottage financier, par exemple, de Gibraltar, des îles Caïmans ou du Liechtenstein, par l’interdiction faite aux banques travaillant avec les pouvoirs publics d’y ouvrir des filiales ?
La taxation des revenus financiers est une exigence démocratique minimale. Ces revenus devraient être taxés exactement au même taux que les revenus du travail. Ce n’est le cas nulle part, en particulier dans l’Union européenne.
La liberté totale de circulation des capitaux déstabilise la démocratie. C’est pourquoi il importe de mettre en place des mécanismes dissuasifs. L’un d’entre eux est la taxe Tobin, du nom du Prix Nobel américain d’économie qui la proposa dès 1972. Il s’agit de taxer, de manière modique, toutes les transactions sur les marchés des changes pour les stabiliser et, par la même occasion, pour procurer des recettes à la communauté internationale. Au taux de 0,1 %, la taxe Tobin procurerait, par an, quelque 166 milliards de dollars, deux fois plus que la somme annuelle nécessaire pour éradiquer la pauvreté extrême d’ici au début du siècle (3).
De nombreux experts ont montré que la mise en oeuvre de cette taxe ne présente aucune difficulté technique (4). Son application ruinerait le credo libéral de tous ceux qui ne cessent d’évoquer l’absence de solution de rechange au système actuel.
Pourquoi ne pas créer, à l’échelle planétaire, l’organisation non gouvernementale Action pour une taxe Tobin d’aide aux citoyens (Attac) ? En liaison avec les syndicats et les associations à finalité culturelle, sociale ou écologique, elle pourrait agir comme un formidable groupe de pression civique auprès des gouvernements pour les pousser à réclamer, enfin, la mise en oeuvre effective de cet impôt mondial de solidarité.
(1) Lire André Gorz, Misères du présent, richesse de l’avenir, Galilée, Paris, 1997 ; ainsi que la communication de Bernard Cassen au colloque « La social-démocratie à l’heure de la mondialisation », organisé par le Parti québécois (PQ), à Québec, les 27 et 28 septembre 1997. Par ailleurs, le Groupe de Lisbonne, présidé par Riccardo Petrella, va prochainement publier aux éditions Labor, à Bruxelles, une étude intitulée Le Désarmement financier.
(2) Cf. François Chesnais, La Mondialisation du capital, Syros, Paris, 1997 (nouvelle édition augmentée).
(3) Rapport sur le développement humain 1997, Economica, Paris, 1997.
(4) Cf. Mahbub Ul Haq, Inge Kaul, Isabelle Grunberg, The Tobin Tax : Coping with Financial Volatility, Oxford University Press, Oxford, 1996. Lire Le Monde diplomatique, février 1997.
Je vais poster ici quelques articles politiques pris ca et la sur le web pour montrer ce qui me choque ou ce qui me parait etre un danger. Juste pour etre vigilant et ne pas oublier. "Celui qui vend un peu de liberté pour un peu de securité ne merite ni l un ni l'autre"
lundi 24 octobre 2011
samedi 15 octobre 2011
Les "indignés" se mobilisent à travers le monde
samedi 15 octobre 2011 09h34 Imprimer cet article [-] Texte [+]
par Michel Rose
MILAN (Reuters) - Les "indignés" manifestent ce samedi à travers la planète pour dénoncer le poids de la finance et les politiques d'austérité qui, disent-ils, mènent le monde à la ruine et condamnent une partie de l'humanité à la pauvreté.
Inspirés par les "indignados" précurseurs de Madrid, galvanisés par le mouvement Occupy Wall Street, différents collectifs reliés entre eux par internet appellent à manifester à Londres, Berlin, Francfort, Athènes, Montréal, New York...
Selon le réseau 15october.net, qui recense les appels à manifester, des rassemblements sont prévus dans au moins 951 villes à travers 82 pays.
Plusieurs centaines de personnes ont défilé dans les rues d'Auckland en Nouvelle-Zélande avant de se rassembler sur une place de la ville où 3.000 participants ont scandé des slogans en tapant sur des tambours.
Quelque 2.000 manifestants, des représentants de la communauté aborigène, des syndicalistes et des militants communistes, se sont réunis à Sydney devant la banque centrale d'Australie tandis que l'on dénombrait 200 protestataires dans la capitale Wellington.
A Melbourne, où était donné le coup d'envoi de cette journée de mobilisation mondiale, un millier de personnes se sont réunies sur une place du centre-ville.
Plusieurs centaines de personnes, dont des militants opposés au nucléaire, ont marché à Tokyo et quelques dizaines se sont rendus devant l'ambassade des Etats-Unis à Manille aux Philippines aux cris de "à bas l'impérialisme américain".
Dans des villes comme Londres ou Athènes, théâtres de récentes émeutes, les forces de police sont sur les dents. D'autant que nul ne peut anticiper l'ampleur de la mobilisation qui s'appuie largement sur les réseaux sociaux.
"Pour nous, le moment est venu de nous unir, pour eux, le moment est venu de nous écouter. Peuples du monde entier, levez-vous !", proclame le site United for #GlobalChange (ensemble pour un changement global).
"Nous ne sommes pas des marchandises entre les mains des politiciens et des banquiers qui ne nous représentent pas. Nous allons manifester pacifiquement, débattre et nous organiser jusqu'à obtenir le changement mondial que nous voulons", poursuit cette coordination virtuelle.
CONTRE LE "CAUCHEMAR GREC"
Les organisateurs insistent sur le caractère pacifiste du mouvement de protestation. Vendredi, cependant, un groupe d'étudiants a fait irruption dans le centre financier de Milan dans les locaux de la banque Goldman Sachs, sur laquelle se concentre une large part de la colère des indignés.
"J'attends ce mouvement depuis longtemps, depuis 2008", témoigne Daniel Schreiber, un Berlinois de 28 ans ulcéré par les répercussions du sauvetage des établissements financiers après la faillite de la banque Lehman Brothers.
"Je me demandais pourquoi les gens n'étaient pas indignés, pourquoi rien ne se passait et finalement, trois ans plus tard, cela arrive enfin", ajoute-t-il.
Trois ans après la chute de Lehman Brothers, emporté par l'éclatement de la bulle des crédits "subprime", et après les plans de soutien et de relance financés par la puissance publique, les pays occidentaux, notamment dans la zone euro, vivent désormais au rythme des plans de rigueur et des cures d'austérité.
"Ce qui se passe aujourd'hui en Grèce, c'est le cauchemar qui attend d'autres pays à l'avenir. La solidarité est l'arme des peuples", écrit le groupe Démocratie réelle, qui appelle à manifester samedi dans le centre d'Athènes, sur la place Syntagma.
Le mouvement est parti au printemps d'Espagne, le pays de l'UE au taux de chômage le plus élevé (plus de 20% de la population active, jusqu'à 45% chez les jeunes de 18-25 ans).
L'occupation de la place Puerta del Sol, à Madrid, a fait des émules à travers l'Europe, à commencer par la Grèce, où le déblocage de l'aide financière de l'UE et du FMI est assorti de conditions d'austérité draconiennes.
Des mouvements semblables se sont développés au Chili ou en Israël. En France, la place de la Bastille à Paris a été quelques temps un centre de ralliement de la contestation.
QUELLE INFLUENCE ?
Aux Etats-Unis, le mot d'ordre Occupy Wall Street a été lancé cet été sur internet par les activistes du collectif Adbusters (littéralement les Casseurs de pub), un groupe créé à Vancouver qui combat le capitalisme et détourne les codes de la société de consommation.
"Nous étions inspirés par ce qui s'était produit en Tunisie et en Egypte. Nous avions le sentiment que l'Amérique était mûre pour vivre son propre Tahrir", explique Kalle Lasn, co-fondateur du groupe, en référence à la place du Caire devenue l'hiver dernier l'épicentre de la contestation contre le régime d'Hosni Moubarak.
"Nous avions le sentiment qu'une indignation véritable montait en Amérique et nous avons voulu produire l'étincelle qui permettrait à cette indignation de s'exprimer", continue-t-il.
Occupy Wall Street appelait à se rassembler autant de temps que nécessaire à partir du 17 septembre. Le mouvement entrera lundi dans son deuxième mois et les protestataires campent toujours dans un village de tentes dressé dans le parc de Zucotti, près du coeur financier de Manhattan.
Spyro, un Britannique de 28 ans très actif dans la préparation du rassemblement prévu samedi à Londres sous la bannière "Occupy the Stock Exchange", résume les raisons de ce mouvement global de colère contre "le système financier".
Les banques, rappelle-t-il, ont été renflouées sur fonds publics, mais les pratiques des bonus et des stock-options sont restées inchangées tandis que les Etats, sous l'oeil des marchés et des agences de notation, engageaient des politiques d'austérité et que le chômage, en particulier chez les jeunes, augmentait. "Partout dans le monde, nous disons que cela suffit", poursuit-il.
D'Athènes à New York, les revendications restent assez générales, elles visent les 1% de la population accusées de concentrer l'essentiel des richesses, elles accusent les gouvernements élus d'être sourds à cette colère.
L'efficacité de cette mobilisation reste à démontrer.
"Il y a plus de sympathisants que de personnes qui manifestent réellement", souligne Mary Bossis, professeur à l'université grecque du Pirée. En dépit des situations de désespoir créées par les mesures d'austérité, ajoute-t-elle, il semble que l'étincelle qui lancerait un mouvement durable fait défaut.
"S'ils se font entendre dans tous les pays tourmentés par les crises économiques et financières, il est difficile de mesurer le poids exact de leurs protestations, leur capacité d'entraînement et l'efficacité de leur révolte sur les choix des gouvernants", écrit Dominique Quinio, du quotidien français La Croix qui consacre un dossier au sujet.
Henri-Pierre André pour le service français
© Thomson Reuters 2011 Tous droits réservés.
par Michel Rose
MILAN (Reuters) - Les "indignés" manifestent ce samedi à travers la planète pour dénoncer le poids de la finance et les politiques d'austérité qui, disent-ils, mènent le monde à la ruine et condamnent une partie de l'humanité à la pauvreté.
Inspirés par les "indignados" précurseurs de Madrid, galvanisés par le mouvement Occupy Wall Street, différents collectifs reliés entre eux par internet appellent à manifester à Londres, Berlin, Francfort, Athènes, Montréal, New York...
Selon le réseau 15october.net, qui recense les appels à manifester, des rassemblements sont prévus dans au moins 951 villes à travers 82 pays.
Plusieurs centaines de personnes ont défilé dans les rues d'Auckland en Nouvelle-Zélande avant de se rassembler sur une place de la ville où 3.000 participants ont scandé des slogans en tapant sur des tambours.
Quelque 2.000 manifestants, des représentants de la communauté aborigène, des syndicalistes et des militants communistes, se sont réunis à Sydney devant la banque centrale d'Australie tandis que l'on dénombrait 200 protestataires dans la capitale Wellington.
A Melbourne, où était donné le coup d'envoi de cette journée de mobilisation mondiale, un millier de personnes se sont réunies sur une place du centre-ville.
Plusieurs centaines de personnes, dont des militants opposés au nucléaire, ont marché à Tokyo et quelques dizaines se sont rendus devant l'ambassade des Etats-Unis à Manille aux Philippines aux cris de "à bas l'impérialisme américain".
Dans des villes comme Londres ou Athènes, théâtres de récentes émeutes, les forces de police sont sur les dents. D'autant que nul ne peut anticiper l'ampleur de la mobilisation qui s'appuie largement sur les réseaux sociaux.
"Pour nous, le moment est venu de nous unir, pour eux, le moment est venu de nous écouter. Peuples du monde entier, levez-vous !", proclame le site United for #GlobalChange (ensemble pour un changement global).
"Nous ne sommes pas des marchandises entre les mains des politiciens et des banquiers qui ne nous représentent pas. Nous allons manifester pacifiquement, débattre et nous organiser jusqu'à obtenir le changement mondial que nous voulons", poursuit cette coordination virtuelle.
CONTRE LE "CAUCHEMAR GREC"
Les organisateurs insistent sur le caractère pacifiste du mouvement de protestation. Vendredi, cependant, un groupe d'étudiants a fait irruption dans le centre financier de Milan dans les locaux de la banque Goldman Sachs, sur laquelle se concentre une large part de la colère des indignés.
"J'attends ce mouvement depuis longtemps, depuis 2008", témoigne Daniel Schreiber, un Berlinois de 28 ans ulcéré par les répercussions du sauvetage des établissements financiers après la faillite de la banque Lehman Brothers.
"Je me demandais pourquoi les gens n'étaient pas indignés, pourquoi rien ne se passait et finalement, trois ans plus tard, cela arrive enfin", ajoute-t-il.
Trois ans après la chute de Lehman Brothers, emporté par l'éclatement de la bulle des crédits "subprime", et après les plans de soutien et de relance financés par la puissance publique, les pays occidentaux, notamment dans la zone euro, vivent désormais au rythme des plans de rigueur et des cures d'austérité.
"Ce qui se passe aujourd'hui en Grèce, c'est le cauchemar qui attend d'autres pays à l'avenir. La solidarité est l'arme des peuples", écrit le groupe Démocratie réelle, qui appelle à manifester samedi dans le centre d'Athènes, sur la place Syntagma.
Le mouvement est parti au printemps d'Espagne, le pays de l'UE au taux de chômage le plus élevé (plus de 20% de la population active, jusqu'à 45% chez les jeunes de 18-25 ans).
L'occupation de la place Puerta del Sol, à Madrid, a fait des émules à travers l'Europe, à commencer par la Grèce, où le déblocage de l'aide financière de l'UE et du FMI est assorti de conditions d'austérité draconiennes.
Des mouvements semblables se sont développés au Chili ou en Israël. En France, la place de la Bastille à Paris a été quelques temps un centre de ralliement de la contestation.
QUELLE INFLUENCE ?
Aux Etats-Unis, le mot d'ordre Occupy Wall Street a été lancé cet été sur internet par les activistes du collectif Adbusters (littéralement les Casseurs de pub), un groupe créé à Vancouver qui combat le capitalisme et détourne les codes de la société de consommation.
"Nous étions inspirés par ce qui s'était produit en Tunisie et en Egypte. Nous avions le sentiment que l'Amérique était mûre pour vivre son propre Tahrir", explique Kalle Lasn, co-fondateur du groupe, en référence à la place du Caire devenue l'hiver dernier l'épicentre de la contestation contre le régime d'Hosni Moubarak.
"Nous avions le sentiment qu'une indignation véritable montait en Amérique et nous avons voulu produire l'étincelle qui permettrait à cette indignation de s'exprimer", continue-t-il.
Occupy Wall Street appelait à se rassembler autant de temps que nécessaire à partir du 17 septembre. Le mouvement entrera lundi dans son deuxième mois et les protestataires campent toujours dans un village de tentes dressé dans le parc de Zucotti, près du coeur financier de Manhattan.
Spyro, un Britannique de 28 ans très actif dans la préparation du rassemblement prévu samedi à Londres sous la bannière "Occupy the Stock Exchange", résume les raisons de ce mouvement global de colère contre "le système financier".
Les banques, rappelle-t-il, ont été renflouées sur fonds publics, mais les pratiques des bonus et des stock-options sont restées inchangées tandis que les Etats, sous l'oeil des marchés et des agences de notation, engageaient des politiques d'austérité et que le chômage, en particulier chez les jeunes, augmentait. "Partout dans le monde, nous disons que cela suffit", poursuit-il.
D'Athènes à New York, les revendications restent assez générales, elles visent les 1% de la population accusées de concentrer l'essentiel des richesses, elles accusent les gouvernements élus d'être sourds à cette colère.
L'efficacité de cette mobilisation reste à démontrer.
"Il y a plus de sympathisants que de personnes qui manifestent réellement", souligne Mary Bossis, professeur à l'université grecque du Pirée. En dépit des situations de désespoir créées par les mesures d'austérité, ajoute-t-elle, il semble que l'étincelle qui lancerait un mouvement durable fait défaut.
"S'ils se font entendre dans tous les pays tourmentés par les crises économiques et financières, il est difficile de mesurer le poids exact de leurs protestations, leur capacité d'entraînement et l'efficacité de leur révolte sur les choix des gouvernants", écrit Dominique Quinio, du quotidien français La Croix qui consacre un dossier au sujet.
Henri-Pierre André pour le service français
© Thomson Reuters 2011 Tous droits réservés.
jeudi 13 octobre 2011
Le troc au Venezuela - un projet politique
06.10.2011
Le troc au Venezuela - un projet politique
"Patria, Socialismo, trueke, venceremos!"
Au Venezuela, tout est teinté du rouge socialiste. Les slogans socialistes et la figure emblématique du président Chavez sont partout, tagués sur les murs, arborant les péages, sur les panneaux qui nous accueillent à l’entrée des villes, posters dans les bureaux...on a même croisé une petite fille portant un tee-shirt à l’effigie du président. Alors que Chavez est hospitalisé à Cuba, un soir en allumant la télévision, on tombe sur un micro-trottoir où les passants font l’éloge de leur président, entre larmes et déclarations d’amour, Chavez est décidément la star du Venezuela.
Le réseau de troc est bien évidemment lui aussi socialiste, initié par Chavez, soutenu par le Ministère du Pouvoir Populaire pour les Communes et la Protection Sociale, inscrit dans la Ley organica del Sistema Comunal, et les porte-parole du réseau sont tous très engagés politiquement (contrairement à TAOA qui est engagé mais apolitique). Dans cette double page, nous relaterons des faits et partagerons avec vous les témoignages des acteurs du troc vénézuélien.
Le troc, un projet politique.
“El trueke no es el fin en si mismo sino que el fin es político porque nosotros y nosotras somos revolucionarios que queremos construir el estado comunal” (« Le troc n’est pas une fin en soi, la finalité est politique. Nous sommes révolutionnaires et voulons construire l’Etat Communal) - Yolanda, porte-parole nationale du réseau de troc du Venezuela.
Au Venezuela, le troc naît dans le cadre du projet politique de Chavez. Dès 2006, Chavez s’exprime publiquement sur le sujet :
«un pourcentage de la production doit obligatoirement être destiné à un marché communautaire où l’idée n’est pas de vendre dans une optique de profit économique. Et une autre partie de la production doit être vendue sur le marché traditionnel pour pérenniser l’effort productif» (extrait d’une déclaration sur ViveTV).
La politique de Chavez repose sur les idées de Simon Bolivar, el libertador, redonner le pouvoir au peuple. El poder popular est le coeur de la politique de Chavez. Par ailleurs, le Venezuela est extrêmement dépendant de l’extérieur. Pour caricaturer, à peine, le Venezuela ne produit quasiment rien à part du pétrole et est contraint d’importer tout le reste.
Nous rencontrons une des déléguées du Ministère des Communes, Maria Teresa Quintana. Elle nous explique que Chavez, en favorisant l’émergence de différents modèles socio-productifs communautaires, dont les systèmes de troc, souhaite réduire la dépendance vis-à-vis des importations, que le pays devienne autosuffisant et puisse ainsi assurer son développement économique. Chavez veut donner les moyens et les outils au peuple pour que les communautés soient en mesure de produire ce dont elles ont besoin pour se nourrir, réapprendre à cultiver la terre.
“La Constitution de la République Bolivarienne du Venezuela permet l’émer-gence de nouvelles formes d’organisa-tion socio-productives (…) le modèle socio-productif communautaire et ses différentes formes d’organisation populaire sont basées sur des relations de production solidaires, via la mobilisa-tion des potentialités productives de la communauté, comme outil pour impul-ser le développement intégral du pays » Hugo Chavez, Ley para el fomento y desarrollo de la economia popular-août 2008.
Comme l’explique Américo Mata dans son livre Desafiando al dinero, las redes de trueke en Venezuela, los sistemas de trueke sont un des modèles socio-productifs impulsés par Chavez pour faire avancer la construction d’une économie socialiste, aux côtés des petites et moyennes industries, coopératives, entreprises familiales, unités de propriété socialistes, conseils communaux et autres formes et modèles d’associations communautaires et productives. De tels systèmes se basent sur la participation populaire pour réactiver les économies locales, mettre en valeur le patrimoine culturel et économique des communautés, et satisfaire les besoins (sociaux et matériels) de chacun.
Le troc inscrit dans la Constitution
Si dans la plupart des pays, les monnaies sociales sont plus ou moins tolérées par le législateur (mais rarement officiellement légalisées), le Venezuela se distingue en inscrivant le troc dans sa Constitution.
Vous pouvez retrouver ces articles et le reste de notre enquête Venezuela dans notre Newsletter n°5
Pour un récit tout en image, retrouvez notre roman photo sur la page facebook de TAOA
Toutes les infos, toutes les publications sur www.taoaproject.org
Le troc au Venezuela - un projet politique
"Patria, Socialismo, trueke, venceremos!"
Au Venezuela, tout est teinté du rouge socialiste. Les slogans socialistes et la figure emblématique du président Chavez sont partout, tagués sur les murs, arborant les péages, sur les panneaux qui nous accueillent à l’entrée des villes, posters dans les bureaux...on a même croisé une petite fille portant un tee-shirt à l’effigie du président. Alors que Chavez est hospitalisé à Cuba, un soir en allumant la télévision, on tombe sur un micro-trottoir où les passants font l’éloge de leur président, entre larmes et déclarations d’amour, Chavez est décidément la star du Venezuela.
Le réseau de troc est bien évidemment lui aussi socialiste, initié par Chavez, soutenu par le Ministère du Pouvoir Populaire pour les Communes et la Protection Sociale, inscrit dans la Ley organica del Sistema Comunal, et les porte-parole du réseau sont tous très engagés politiquement (contrairement à TAOA qui est engagé mais apolitique). Dans cette double page, nous relaterons des faits et partagerons avec vous les témoignages des acteurs du troc vénézuélien.
Le troc, un projet politique.
“El trueke no es el fin en si mismo sino que el fin es político porque nosotros y nosotras somos revolucionarios que queremos construir el estado comunal” (« Le troc n’est pas une fin en soi, la finalité est politique. Nous sommes révolutionnaires et voulons construire l’Etat Communal) - Yolanda, porte-parole nationale du réseau de troc du Venezuela.
Au Venezuela, le troc naît dans le cadre du projet politique de Chavez. Dès 2006, Chavez s’exprime publiquement sur le sujet :
«un pourcentage de la production doit obligatoirement être destiné à un marché communautaire où l’idée n’est pas de vendre dans une optique de profit économique. Et une autre partie de la production doit être vendue sur le marché traditionnel pour pérenniser l’effort productif» (extrait d’une déclaration sur ViveTV).
La politique de Chavez repose sur les idées de Simon Bolivar, el libertador, redonner le pouvoir au peuple. El poder popular est le coeur de la politique de Chavez. Par ailleurs, le Venezuela est extrêmement dépendant de l’extérieur. Pour caricaturer, à peine, le Venezuela ne produit quasiment rien à part du pétrole et est contraint d’importer tout le reste.
Nous rencontrons une des déléguées du Ministère des Communes, Maria Teresa Quintana. Elle nous explique que Chavez, en favorisant l’émergence de différents modèles socio-productifs communautaires, dont les systèmes de troc, souhaite réduire la dépendance vis-à-vis des importations, que le pays devienne autosuffisant et puisse ainsi assurer son développement économique. Chavez veut donner les moyens et les outils au peuple pour que les communautés soient en mesure de produire ce dont elles ont besoin pour se nourrir, réapprendre à cultiver la terre.
“La Constitution de la République Bolivarienne du Venezuela permet l’émer-gence de nouvelles formes d’organisa-tion socio-productives (…) le modèle socio-productif communautaire et ses différentes formes d’organisation populaire sont basées sur des relations de production solidaires, via la mobilisa-tion des potentialités productives de la communauté, comme outil pour impul-ser le développement intégral du pays » Hugo Chavez, Ley para el fomento y desarrollo de la economia popular-août 2008.
Comme l’explique Américo Mata dans son livre Desafiando al dinero, las redes de trueke en Venezuela, los sistemas de trueke sont un des modèles socio-productifs impulsés par Chavez pour faire avancer la construction d’une économie socialiste, aux côtés des petites et moyennes industries, coopératives, entreprises familiales, unités de propriété socialistes, conseils communaux et autres formes et modèles d’associations communautaires et productives. De tels systèmes se basent sur la participation populaire pour réactiver les économies locales, mettre en valeur le patrimoine culturel et économique des communautés, et satisfaire les besoins (sociaux et matériels) de chacun.
Le troc inscrit dans la Constitution
Si dans la plupart des pays, les monnaies sociales sont plus ou moins tolérées par le législateur (mais rarement officiellement légalisées), le Venezuela se distingue en inscrivant le troc dans sa Constitution.
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